"Corbigny
n'est point Morvan, il ne s'en faut que d'une semelle, Morvandelle !"
chantait-on autrefois. C'est peut-être l'explication de la rivalité
de Lormes avec sa voisine, à moins que ce ne soit la jalousie des Lormois
devant une ville plus prospère. Les deux cités ne sont séparées,
en effet, que de treize kilomètres. Située dans la plaine du Bazois
à proximité du canal
du Nivernais et desservie par une ligne de chemin de fer la reliant directement
à Paris, Corbigny avec un peu moins de 2000 habitants est une agréable
petite ville traversée par l'Anguison, un affluent de l'Yonne.
En
864 est fondée par Saint Egile une abbaye bénédictine sous
le vocable de Saint Pierre puis de Saint Léonard après le transfert
de ses reliques. Deux siècles plus tard s'édifiera à proximité
une petite bourgade qui se dotera de fortifications. La ville est alors une
des premières étapes après le départ de Vézelay
sur la route
de Compostelle. Occupée par les huguenots en 1563, elle deviendra
la capitale régionale du protestantisme.
L'imposante
abbaye,
identifiable de loin à sa tour carrée, est aujourd'hui un bâtiment
classé consacré aux arts où se déroulent régulièrement
des concerts réputés. Un peu plus loin,
l'église
Saint Seine
dont
l'intérieur
est de style gothique flamboyant a été édifiée au
début du 16ème siècle après plusieurs
destructions d'une église primitive.
C'est à Corbigny qu'est né Maurice Etienne Legrand qui se fit connaître comme poète, humoriste et journaliste sous le nom de Franc Nohain. Il est le père de Jean Nohain, célèbre animateur des premières émissions de la télévision française, et de l'acteur Claude Dauphin.
De 1901 à 1939 une ligne de chemin de fer secondaire, surnommée "le tacot" a relié Corbigny à Saulieu en passant par Lormes.
L'Emeraude
C'est
le 15 janvier 1934 que la ville allait entrer dans l'histoire avec l'accident
de l'Emeraude. En 1932, la compagnie Air Orient faisait étudier
un avion destiné à desservir la ligne Paris - Saïgon. Le
"Dewoitine
332 Emeraude"
relevait le défi. Certifié en 1933, la compagnie Air France nouvellement créée le testait en décembre de la même année sur sa ligne d'extrême-orient. A son retour, il ramenait en France le Gouverneur Général de l'Indochine et son aide de camp.
Parti le 5 janvier 1934 de Saïgon, il atteignait Lyon malgré plusieurs
incidents (dont la destruction partielle du train d'atterrissage à Gwadar
au Bélouchistan). Le 15 en début de soirée sur un ordre
reçu de la direction d'Air France (selon une hypothèse
jamais confirmée), alors que le temps était exécrable sur
le trajet, il décollait en direction de l'aéroport parisien du
Bourget. A 19 h 33, un dernier message indiquait que l'appareil traversait
une tempête de neige. Sept minutes plus tard, volant trop bas on ne sait
pourquoi, il s'écrasait sur une colline à l'ouest de Corbigny.
L'accident,
faisait dix victimes (dont Maurice Noguès, pionnier de l'aviation,
Directeur Général-Adjoint d'Air France) qui, après
une
cérémonie
à Corbigny,
devaient recevoir des
obsèques
nationales
à Paris au Grand-Palais.
En 1938 était édifié sur le lieu de l'accident un monument constitué de quatre colonnes pointées vers le ciel adossé à une stèle inclinée. Sur celle-ci sont placés dix médaillons rappelant les noms de chacune des dix victimes. La stèle, large de 26 mètres représente l'envergure de l'appareil, la hauteur du monument (19 mètres) correspondant à sa longueur. Dégradé au fil du temps, le monument a été entièrement restauré en 2003 à l'initiative de la ville et de l'association "L'avion Emeraude - janvier 1934".
Je vous propose de regarder une vue panoramique sur le Morvan depuis la table d'orientation située devant le monument.